J’avais raté le The road part I, sorti en 2017. Je suis pourtant sévèrement accroché à l’univers d’Unkle et l’occasion m’est généreusement offerte de me rattraper puisque ce deuxième volet d’une trilogie, logiquement appelé The road part II, livre 2 cds et 22 titres au total. Si on pourrait, au vu d’un tel contenu, craindre l’inégal, l’appréhension s’avère de temps à autre justifiée. Faisant appel à de nombreux invités (Mick Jones, Mark Lanegan ou Troy Van Leeuwen, pour faite très court tant la liste est conséquente), le projet de James Lavelle propose pourtant un trip digne d’être vécu, qui met en avant les voix et le climat (Feel more/With less, l’intense Requiem(When you talk of love)), expérimente au sein d’un carcan trip-hop jamais fermé (Ar.mour et ses atours psyché-funky, plus que bon) et, comme à son habitude, trouve des sons et ambiances qu’on garde avec soi. La diversité des voix, permise par les « guests », constitue bien entendu un plus. Graves ou plus chatoyantes, veloutées (The other side), elles étayent l’album comme il se doit. Nothing to give, alerte, amène un groove qui nous collera au cerveau. Ombrageux, il est en phase avec ses chants, hip-hop, sombres.
Sur ce premier cd, Only you confirme la qualité d’un contenu aussi aventureux que parfois dénudé (Long gone), qui, toutefois, « dévie » encore peu pour le moment. The first time ever I saw your face, dépouillé, se montrant prudent, dédié à la voix, à l’émotion qu’elle dégage, sans autre atout tangible.
On attend donc la « crue », Crucifixion/A prophet apporte sur l’amorce du second cd une grisaille cold bienvenue. Powder man allie voix et ornement restreint, l’option est souvent de mise mais peut finir par ennuyer. Kubrick débute joliment, s’enhardit ensuite sous l’impulsion d’un fond électro. L’opus s’anime, il est même, pour le coup, rock. Et convaincant. On aimerait néanmoins plus de hardiesse, Sun (the) fait certes briller les organes vocaux mais ne décolle pas. Du moins le croit-on car lentement, il monte et prend l’auditoire dans ses volutes avant de trop vite trouver son terme. C’est encore un peu bridé, Find an outsider se montrant lui plus animé, suivant une trame électro-rock accomplie.
L’impression de retenue subsiste pourtant, en dépit des qualités intrinsèques de chacun des morceaux offerts. On s’inscrit plus, ici, dans la dualité voix-décor sobre (Days and nights). On la fait alterner avec des plages plus déviantes (l’excellent Reprise, flou, brumeux, et soutenu; un exercice trip-hop de choix!). Comme dit ailleurs, The road part II/Lost highway est parfait à écouter de nuit, dans la brume. Il s’achève avec Touch me, où chant féminin et décor qui pulse s’acoquinent avec brio. La conclusion est bonne, le disque peut parfois inciter au décrochage mais réserve aussi son lot de morceaux élevés, de beauté dans le chant, d’instants assez accrocheurs pour qu’on lui consacre une réelle attention.