Le son de Duo Ruut repose sur une alliance singulière entre deux jeunes musiciennes et compositrices estoniennes aux parcours et aux sensibilités contrastées : Ann-Lisett Rebane et Katariina Kivi, qui ont pour seul socle la cithare estonienne et deux voix qui se répondent, se croisent, s’harmonisent. Déjà ça attire mais quand résonne ce deuxième album nommé Ilmateade (Le bulletin météo), basé sur des textes traditionnels estoniens pour narrer des histoires de différents lieux, temps et époques, l’envoûtement se dessine. INTRO, sous la minute, sème d’emblée une beauté sombre, des voix éthérées, une finesse prenante. UDU (‘Fog’), seconde merveille, fait briller les vocaux et scintiller l’instrument, dépaysant. La magnificence est de mise, dans une vêture folk singulière. Lo-fi par endroits, de sons tantôt tordus, l’univers des deux dames est sensationnel. VASTLALAUL FT. PUULUUP (‘Sledding Song’), où l’invité « grave » le track, allie les chants merveilleusement. KUUSE KOHT (‘The Spruce’) se joue plus rude, pas moins reluisant. Il y a une âme, chez Duo Ruut, une sensibilité, une approche qui permet au filles de l’est de se surpasser.
HOBUSEMÄNG (‘Horse Game’) se dénude, là encore les mots se greffent. Des abris dark s’invitent, ornant de pures mélodies. INTERLUDE FT. ERKI PÄRNOJA offre des notes subtiles, une trame à nouveau désarçonnant. La magie opère. PULMADEKS (‘For the Wedding’) la reproduit, dans l’économie de surenchère l’opus touche à la grâce. SUVI RANNAS (‘Summer at the Beach’), qu’on dirait serti de claquettes, se pare de sonorités qui derechef emmènent. On ne se fera pas prier, loin s’en faut, pour suivre la paire dans le voyage instigué. ENNE ÖÖD FT. EIK (‘Nightfall’), sur lequel un chant masculin revient, se délie superbement et de son contraste, impose sa superbe et s’emphase avec maestria.
©Ako Lehemets
Sur la fin le niveau reste constant, l’attraction optimale. VILUD ILMAD (‘Gloomy Days’) sacre la cithare, ces syllabes d’anges et la musicalité du tout. SAJA, LASE (‘Rain, pour’) fait de même, légèrement vacillant, doté de montées toutes en splendeur. Enfin OUTRO, dreamy, souillé non sans adresse, presque drone mais très…Duo Ruut avant toute chose, souffle un terme étoilé, à l’issue, donc, d’une série de morceaux auxquels toute résistance ne peut censément s’apposer.