Errance, sax en main et pas que. Oreilles ouvertes, les yeux aux aguets. Captation et créations de sons, immersion dans les milieux. La Démesure du pas, poussé loin. Matthieu Prual (Saxophone soprano, flûtes, hochets de pied, direction artistique) et quelques complices de balade, dans une démarche décalée, brossent des paysages. Captivants, ceux-ci s’esquissent en tous lieux, se nourrissent des bruits de l’autour. Somewhere, première pièce livrée, le démontre, comme si l’aquatique dans l’obscur jazzait. Extrêmement immersif, Musique Migratoire – Enregistrements Nomades a la texture inédite.
©Vincent Moon
Libre, enfanté en marchant, il prend le chemin de terres nouvelles. Marche dans l’épaisseur le drone, les ambiances grises de l’opus fascinent. L’esprit flotte, entrevoit d’autres formes, vibrantes, fragiles, presque inquiétantes. Carol Robinson · Clarinette Mib; Gabriel Lemaire · Saxophone alto; Toma Gouband · Percussions in situ, pierre, métal, bois, eau, voix; Joris Rühl · Clarinette Sib et Christophe Havard · Mise en son, à l’unisson, concourent à démarquer ce qui de leur pérégrinations émane.
Mespras, aux tintements d’on ne saura où, façonne un sorte de jazz de la verdure, peut-être, ou de zone sableuse. On ne sait jamais, où nos oreilles amerrissent. La sensation n’en est que plus grande, l’effort d’imagination prend de l’ampleur. VIP et son vent de pré-orage, à la majesté trouble, saisit. Marche fictive et ses interjections itou, j’aime d’ailleurs quand le chant bordure. Ce disque soit tu le ranges, et c’est marre, soit tu y restes englué, comme prisonnier. Comme geôle il y a bien pire, le fleuri Sainte marguerite produit d’ailleurs le plus grand bien. Marche démesurante lui succède, oiseau, maritime. Ressac, vol de jazz dérangé. L’expérimentation, hors-murs, s’avère fructueuse. Clarinette bulle…bulle, presque psyché, et fige la perception. La Démesure du pas, à sa mesure, propose une fugue déroutante an naturel enveloppant.
©Philippe Olivier
Ritournelle dorémi, aux sons -quasi indus- répétés sur tissu jazzy serein, prolonge le trip. Eau to crunch grince, se fait cliquetis, dans un noir grouillant de vie. Et de sonorités, bien entendu, aussi jouées qu’attrapées, chopées à la source. Double flûte joue la sérénade, laisse filtrer des clapotis qui s’intensifient. Rare, l’approche fait de ce Musique Migratoire – Enregistrements Nomades un projet sans équivalent existant, créatif, fourmillant d’idées. La sortie s’achève en After, un peu comme chez les djeun’s mais dans une ivresse sonore bienfaisante, pour le coup, ponctuant une douzaine hautement novatrice.
©Eric Sneed