Inspiré par les 80’s de chez nous, La Main officie dans un créneau synthétique obscur -mais pas toujours car parfois, il se fait jour- et désenchanté, reflété de manière attractive par ce nouvel album appelé La Mélodie du Sombre. Ici, c’est Un festin, linéaire et de ce fait entêtant, voix monocorde et motifs répétitifs pour atouts définitifs, qui amorce le show grisé. Le projet n’est pas né du dernier crachin, d’autres sorties ont vu le jour -dont une de reprises bien senties, très individuelles- et le disque, présenté dans un joli digipack, honore ses pères. Il réjouira ses pairs aussi, peut-être pas mon père mais c’est manifestement mon cas. A l’écoute, un vent cold m’emporte ailleurs. Il souffle vite (Et j’ai hurlé), il dit des choses graves avec, presque, légèreté. Le procédé, minimal, exerce une froide séduction. Il y a de l’aérien, aussi, dans le ton désabusé des morceaux joués. Des abysses, aussi, de lenteur profonde (l’éponyme La mélodie du sombre). La Main développe des climats divers, qui ont en commun leur tonalité pluvieuse, automnale dirai-je même. J’aime. L’identité est palpable, on sent que l’écriture, et le style mis en avant, ne viennent pas de nulle part.
Silence fait, par son rythme qui claque tout en avançant laborieusement pour ensuite complètement se débrider, sensation. Loquace, il dément son intitulé. La mélodie du chant incite, de façon contraire à ce que laissent présager les chansons de La Main, à l’optimisme. Un coup d’oeil à son Soundcloud m’apprend qu’il vient de Clermont-Ferrand, où siègent nombre de groupes notoires. La Main en est. Dans le coin met en avant, entre cadence vive et break tempéré aux claviers fous, la propension des Auvergnats à tirer leur épingle du jeu.
Le goût du sang, son arc en ciel sonore, insistent sur la tendance « mélancolie émoustillante » qui ressort, à l’occasion, de l’ouvrage. L’écriture est de celles qui, sous une plume agile, captent l’attention en s’inscrivant dans un écrin, en outre, adapté. Un support sans excès, mais plaisant à souhait, qui laisse la place aux mots. Caché sous les draps, saccadé, assure à son tour l’union heureuse entre mots sombres, rythme sec et volutes de machines. Caché sous les draps, comme si le monde l’effrayait et c’est peut-être pour ça que La Main, de par ses essais, semble chercher une forme de résilience. Il se bat, pour ça, vigoureusement (l’alerte, excellent et bien nommé Vif). Remarquons, à cet endroit comme ailleurs, la valeur des motifs qui viennent enrober le tout.
Plus le temps, ça se termine déjà ou presque. Aucun regret, l’offrande est à prendre. L’instrumental, boucles séduisantes en poche, ne dénotera en aucun cas. Cet hiver -je qualifiais ce disque d’automnal, après tout il nous aurait sûrement fait passer cette saison avec bonheur-, pour finir, prend pour base une cadence porteuse. Le chant de crooner cold y exprime à nouveau, secondé par des synthés brumeux, des ressentis qui nous pénétreront l’esprit, s’y imprimeront au risque d’y laisser une trace marquée. La Main, révélation pour moi, confirmation pour d’autres, a incontestablement sa place chez Unknown Pleasures Records, à l’antre avant tout réservée à la qualité et l’intégrité.